De l’usage de Twitter à la formation des chercheurs (une tribune à méditer)

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Une tribune publiée sur le site du Monde.fr par Sylvain Deville (chargé de recherche au CNRS) circule beaucoup sur les « réseaux sociaux » depuis hier et mérite une attention particulière.
Dans ce texte intitulé « Twitter et les chercheurs, l’exception française ? » l’auteur se penche sur une situation à laquelle beaucoup d’entre nous ont déjà été confrontés :

« À chaque fois que je discute de l’utilisation de Twitter avec des confrères, on me renvoie un regard mi-étonné, mi-méprisant et toujours lourd de préjugés sur les réseaux sociaux. La recherche, c’est du sérieux. Pas de place pour Twitter. »

Toutes celles et tous ceux qui échangent régulièrement avec nous savent ce que ce média apporte de positif et de sérieux à la recherche : de l’entraide méthodologique à la veille partagée, en passant par les échanges de bons procédés documentaires lorsque le libre accès n’est pas de mise… Je pense toutefois que toutes celles et tous ceux qui échangent régulièrement avec nous ont aussi fait face, au moins une fois, à ce regard « mi-étonné, mi-méprisant et toujours lourd de préjugés«  (qui concerne parfois aussi l’usage des blogs et carnets de recherche en ligne).
 
Ce n’est toutefois pas la seule raison pour laquelle je vous invite vivement à lire cette tribune.

En effet, c’est plus parce que Sylvain Deville y touche du doigt une question que nous considérons ici comme centrale : « la non-adoption de Twitter n’est que la partie émergée de l’iceberg« . Pour l’auteur, il s’agit du problème plus général du rapport des chercheurs français à la communication, mais pas seulement. En effet, le passage de cette tribune qui me semble le plus important est le suivant :

« Au sein même du monde de la recherche, la communication, perçue comme accessoire, est encore bien souvent désastreuse. D’excellents résultats sont trop souvent desservis par une absence totale de maîtrise des principes élémentaires de présentation. Powerpoint et ses transparents illisibles ont contaminé la recherche comme le reste du monde. Une maîtrise minimale de ces outils permet pourtant de lever bien des obstacles freinant la compréhension et la transmission du savoir. Cela semble généralement perdu de vue, au détriment des chercheurs eux-mêmes.« 

Cela fait maintenant quelques années que nous plaidons, avec Franziska, pour une meilleure formation des apprentis chercheurs aux outils informatiques et aux ressources numériques. Sans toujours avoir été entendus comme nous l’aurions souhaité… Au-delà des grandes envolées lyriques autour du « tournant » ou de la « révolution numérique » des SHS et de ses enjeux épistémologiques, la question de la formation des historien-nes en devenir, comme de tous les chercheurs en sciences sociales, à un usage raisonné des outils numériques de base reste posée.
Pour en savoir plus sur nos positions à ce sujet, je vous invite à jeter un œil à la rubrique #dhiha5 au sein de laquelle nous avions réuni quelques billets concernant la formation numérique des historien.nes. Voir aussi notre article publié en 2011 dans la RHMC et désormais librement accessible ; ainsi que cet entretien avec Claire Lemercier réalisé avec Elisa Grandi.
*
Vous pouvez suivre Sylvain Deville sur Twitter : @DevilleSy, comme la @boite_a_outils des historiens et ses auteurs d’ailleurs 😉
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Émilien Ruiz
Historien, assistant professor à Sciences Po. < e-ruiz.com >

4 Comments

  1. Effectivement, cette relative absence sur Twitter pourrait être la partiie émergée de l’iceberg. C’est la conclusion à laquelle j’en arrive depuis deux ans que je dirige l’anthologie des meilleurs blogues de science en français:
    1) il y a un nombre étonnamment faible de scientifiques qui bloguent en français, par rapport aux anglos
    Mais surtout 2) bien que la population française soit neuf fois plus élevée que la population québécoise, il y a tout juste une fois et demi plus de blogueurs français que de blogueurs québécois qui ont participé à cette anthologie. Et nous avons le sentiment d’avoir touché le gros de la communauté.

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